Liberty Media choisit d'humilier Andretti et General Motors

Publié le par Matthieu Piccon

Après des mois d'analyse, Liberty Media a finalement pris sa décision quant à la candidature d'Andretti. Non seulement, le fonds d'investissement a refusé mais a en plus choisi la manière forte dans ses propos.

Cela fait des mois que la saga Andretti alimente les discussions. Surtout c'est devenu un élément dans la lutte d'influence qui oppose désormais la FIA et Liberty Media. La Fédération a ainsi fait savoir en octobre dernier qu'elle estimait la candidature de l'équipe américaine la seule crédible et qu'elle serait désormais étudiée par le détenteur des droits commerciaux.

Or depuis le début, Liberty Media a fait la sourde oreille et n'a jamais accueilli de manière favorable la candidature d'une équipe qui a pourtant fait ses preuves dans de nombreuses catégories de sports automobiles. Même quand Andretti a amené dans la corbeille un accord avec General Motors, via sa filiale Cadillac, les relations entre les deux parties ne se sont pas réchauffées.

Aujourd'hui Liberty Media s'est fendu d'un communiqué de presse qui liste l'ensemble des raisons pour lesquelles il a été décidé de ne pas donner suite à la candidature. Le moins que l'on puisse dire est que la dite liste est longue et n'a pu être rédigée et diffusée que dans le seul but de nuire à la réputation de l'autre partie.

En voici les morceaux choisis :

  • Le candidat évoque une association avec General Motors (GM) qui n'inclut pas au départ la fourniture d'un moteur, avec l'ambition d'un partenariat complet avec GM en tant que motoriste en temps opportun mais ce ne ne sera pas le cas pendant plusieurs années. Avoir la fourniture d'un moteur GM liée à la candidature dès le départ aurait renforcé sa crédibilité, même si cela aurait également constitué un challenge important pour un constructeur novice de s'associer avec un nouveau motoriste. La plupart des tentatives d'établir un nouveau constructeur au cours des dernières décennies ont échoué.
  • Nous ne croyons qu'il y ait la moindre raison pour un nouveau candidat d'être admis en 2025 puisque cela obligerait un entrant novice à construire deux voitures complètement différentes lors de ses deux premières années d'existence. Le fait que le candidat propose de le faire nous fait nous demander s'ils comprennent l'étendue du challenge qui les attend. Même si une arrivée en 2026 ne rencontrerait pas un tel problème, c'est tout même un fait que la F1, en tant que pinacle des sports automobiles mondiaux, représente un challenge technique unique pour les constructeurs, d'une nature que le candidat n'a jamais rencontré dans d'autres formules ou disciplines. Il propose de le faire avec une dépendance avec la fourniture obligatoire d'un moteur pendant les premières années. Sur cette base, nous ne croyons pas que le candidat puisse être un participant compétitif.
  • Arriver dans le sport en tant que nouveau motoriste est un énorme challenge, face auquel des constructeurs automobiles majeurs ont eu du mal dans le passé et qui nécessite un certain nombre d'années d'investissements significatifs pour devenir compétitif. GM a les ressources et la crédibilité pour être plus que capable de se frotter au challenge mais le succès n'est pas assuré.
  • Notre processus d'analyse a conclu que la présence d'une onzième équipe en tant que telle n'apporterait pas de valeur ajoutée au championnat. Le moyen le plus important qu'un nouvel entrant apporte de la valeur est d'être compétitif. Nous ne croyons pas que le candidat serait un concurrent compétitif.
  • Le besoin de toute nouvelle équipe de prendre un moteur obligatoire, potentiellement pendant plusieurs saisons, serait dommageable pour le prestige et le standing du championnat.
  • Même si le nom Andretti est connu des fans de F1, notre étude indique que la F1 apporterait davantage de valeur à la marque Andretti que l'inverse.

Après une telle charge, on peut même s'étonner que Liberty Media concède qu'une candidature à partir de 2028 avec un moteur General Motors d'emblée aurait davantage de chances d'être acceptées. Si la F1 voulait signifier qu'elle ne voulait pas faire venir un des grands noms des sports automobiles, elle ne s'y prendrait pas autrement. Le silence assourdissant sur le site officiel de la discipline en dit ainsi beaucoup puisque le sujet jugé prioritaire par l'équipe rédactionnelle est "Dix ans après le début de la domination de Mercedes : comment se sont passés leurs essais hivernaux"...

Si le détenteur des droits commerciaux affirme qu'il n'a pas consulté l'avis des autres équipes pour prendre sa décision, il indique tout de même qu'il a pris en compte leurs intérêts. La crainte de celles-ci est que leur quote-part soit réduite puisque la croissance des revenus de la discipline ne permettrait pas de compenser le fait de diviser en 11 au lieu de 10.

Quand Liberty Media met en doute la capacité de General Motors de concevoir un moteur performant, le fonds américain accueille à bras ouvert Audi qui va faire exactement la même chose à partir de 2026. La différence est que le constructeur allemand a fait le choix de racheter une équipe de fond de grille plutôt de construire une toute nouvelle structure. A croire que le moyen le plus simple pour Andretti est de simplement contacter et racheter une autre équipe de fond de grille, de surcroit américaine, pour se faire une place. Il se trouve que Gene Haas vient de licencier son directeur historique, ce qui pourrait conduire à des changements plus drastiques encore.

Quand une équipe fondée par la famille d'un champion du monde de Formule 1 et qui a remporté cinq fois le titre Pilotes en CART/IndyCAR et 6 fois l'Indy 500, une autre équipe portera le nom de l'une des plus grandes sociétés de cartes de crédit et une application de paiement en ligne tandis qu'une autre va même alterner les noms en fonction des courses puisque l'un de ses sponsor-titre est une société de paris en ligne, activité interdite dans certains pays où se rend le Formula One Circus...

L'une des règles d'or dans le monde des entreprises est de ne pas insulter l'avenir car les cycles positifs finissent toujours pas se transformer en cycles négatifs. La F1 connait actuellement un âge d'or et pense donc pouvoir se payer le luxe de cracher à la figure d'un constructeur mondial et une équipe reconnue et établie. On peut lui souhaiter de ne pas s'en mordre les doigts le jour où la discipline retombera dans ses travers passés où sa popularité s'érodait d'année en année. A voir si les miracles à la Netflix peuvent se reproduire à l'avenir...

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