Affaire Renault - Piquet : départ de Briatore et Symonds

Publié le par Matthieu Piccon

Renault - Flavio Briatore, Pat SymondsCette fois, c'est fait. Le paddock de Monza le week-end dernier bruissait de rumeurs autour de ce qui est désormais convenu d'appeler l'affaire Renault - Piquet. Mais aujourd'hui, Renault a apporté une certitude : elle se sépare de son directeur d'équipe, le flamboyant Flavio Briatore et de son stratège en chef, véritable numéro 2 de l'équipe, Pat Symonds, présent dans l'écurie depuis 29 ans.

Une saison 2007 difficile

Il faut remonter remonter dans le passé pour comprendre tous les tenants et aboutissants de cette sombre affaire.

La saison 2007 a été calamiteuse pour l'écurie française. Le départ de son double champion du monde en titre, Fernando Alonso, vers McLaren-Mercedes a été un coup rude et Giancarlo Fisichella et le rookie Heikki Kovalainen se révèlent insuffisants pour tirer vers le haut l'écurie. Renault ne termine que troisième au classement général mais sans avoir remporté la moindre victoire et à des années-lumières de McLaren et Ferrari. Heureusement pour l'écurie, la collaboration de Fernando Alonso chez McLaren se passe très mal en raison de la rivalité avec le débutant et protégé Lewis Hamilton, véritable fils spirituel de Ron Dennis.

Fernando Alonso décide alors de retourner à la maison-mère, toute heureuse de récupérer un tel champion. Cela est d'autant plus important que Carlos Ghosn, PDG de Renault et peu fan de Formule 1, demande de plus en plus explicitement des résultats pour que l'écurie reste dans la discipline. Celui-ci déclarait ainsi : "On restera en F1 tant que les résultats seront présents." Autant dire que les résultats de la saison 2007 ne correspondent pas aux résultats escomptés. Flavio Briatore, qui est l'agent de l'Espagnol, affiche donc la nouvelle monoplace de l'écurie, la R28, comme étant l'outil de la reconquête vers les sommets mondiaux.

Las, les résultats du début de saison ne sont que très peu brillants. En effet, la R28 n'est pas si performante que cela et les résultats n'arrivent pas. Lors des 14 premières courses de la saison, le meilleur résultat de Fernando Alonso est une 4ème place obtenue en Australie, Hongrie, Belgique et Italie. Aucun podium, c'est indigne d'un double champion du monde et qui est passé à un point du triplé en 2007. Surtout que c'est guère brillant du côté de son coéquipier, Nelson Piquet Jr, fils du triple champion du monde de Formule 1 Nelson Piquet Sr et dont l'agent est... Flavio Briatore.  Le Brésilien a obtenu une miraculeuse deuxième place lors du Grand-Prix d'Allemagne grâce à une heureuse entrée en piste d'une safety car. Mais le rookie est davantage habitué des bas côtés et des abandons que des douches au champagne sur les podiums. Flavio Briatore, très mécontent des performance du Brésilien, n'hésite pas à s'en prendre publiquement à son pilote dans la presse.

Le Grand-Prix de Singapour 2008

C'est alors qu'arrive le Grand-Prix de Singapour, le premier de l'histoire à se disputer de nuit à Singapour. Le marché asiatique est très important pour Renault et pour Carlos Ghosn, également PDG de Nissan. Un bon résultat serait donc des importants. Les qualifications se passent très mal puisqu'un ennui mécanique empêche Fernando Alonso de faire mieux que 15ème sur la grille. Mais cela reste mieux que pour Piquet, 16ème sur la grille. La course s'annonce donc des plus difficile pour les Tricolores.

Alonso s'arrête très tôt, dès le 12ème tour, alors que la stratégie habituelle pour les pilotes en queue de peleton au départ et de mettre le plus d'essence pour aller le plus loin possible... Mais trois tours plus tard, Nelson Piquet commet une n-ième erreur de pilotage et se fracasse dans le mur. L'entrée de la voiture de sécurité est donc nécessaire pour se débarasser des débris. Alonso profite alors du ravitaillement de tous ses rivaux pour prendre la tête. Il ne la lâchera plus jusqu'à la fin de la course pour remporter une victoire des plus heureuses, surtout pour Briatore. Celui-ci n'hésite pas à évoquer une "intervention de Dieu" pour expliquer cette victoire. On pense alors que l'affaire s'arrête là. Plus personne n'évoque alors cette histoire, surtout que Fernando Alonso confirme sa victoire par un nouveau succès lors du Grand-prix suivant au Japon. Alonso finit la saison à la 5ème place et Renault 4ème, une nouvelle fois très loin de Ferrari, McLaren et BMW.

Les déclarations des Piquet

Très critiqué par Briatore, Nelsinho Piquet parvient néanmoins à garder son baquet pour la saison 2009, à la surprise générale. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ne se fut pas une réussite pour l'écurie puisque lors des dix premières courses de la saison, il est incapable de marquer le moindre point. Cette fois-ci s'en est trop pour les dirigeants de l'écurie, qui avaient introduits une clause de résultats dans le contrat du Brésilien. Le clan Piquet sent donc que la fin est proche. Le 26 juillet, la messe semble dite et le Grand-Prix de Hongrie s'annonce comme le dernier du Brésilien au sein de l'écurie au losange. Son père prend alors contact avec la FIA pour lui dire que son fils est disposé à déposer par rapport au fameux Grand-Prix de Singapour 2008.

Deux raisons évidentes à cela : la première est évidemment liée au renvoi de son fils. Mais la seconde a des racines beaucoup plus ancienne. La dernière écurie de Nelson Piquet Sr est Benetton, dirigée alors par un certain... Flavio Briatore. Celui-ci n'a pas souhaité prolongé son contrat à la fin de la saison 199, préférant un petit jeune faisant ses débuts dans la catégorie reine : Michael Schumacher. Cette sortie par la petite porte a provoqué une profonde inimitié entre Nelson Piquet et Flavio Briatore.

Le 30 juillet, Nelsinho Piquet met à excécution les menaces de son père et témoigne à la FIA. Il affimr alors que son accident au Grand-Prix de Singapour était volontaire et qu'il aurait agi sur ordre de Pat Symonds, en présence de Flavio Briatore. Afin d'être le plus objectif possible, je vous propose de visionner l'accident ainsi que lire ci-dessous la déclaration en version originale :



Les propos de Nelsinho sont on ne peut plus clairs et d'une importance capitale pour l'avenir de l'écurie. Cependant, la bombe n'est que à retardement puisque le témoignage n'est révélé au public qu'un mois plus tard, par la télévision brésilienne (est-ce un hasard ??), le 30 août. Entre temps, Nelsinho Piquet a annoncé lui-même le 3 août qu'il était renvoyé par Renault F1. La confirmation de l'équipe ne viendra que quelques jours plus tard. Généralement, c'est l'employeur qui annonce le départ de ses collaborateurs et non eux-mêmes... La FIA a sollicité le cabinet d'enquêtes Quest afin qu'il vérifie les allégations du pilote brésilien, qui sera de nouveau entendu par le cabinet. Ses propos seront confirmés par un disque dur contenant toutes les relevés lors de la course en question, reçu par la FIA le 28 août, soit pendant le Grand-Prix de Belgique. Lors de ce même week-end, des auditions des membres de l'équipe (dont les deux dirigeants et Fernando Alonso) ont lieu.

Les conséquences de ces déclarations

Le 4 septembre, la FIA décide de convoquer Renault devant le Conseil mondial extraordinaire le 21 septembre, où des explications seront demandées.

La publication sur Internet, le 10 septembre, du témoignage de Nelson Piquet provoque enfin une réaction de l'équipe, qui décide de porter plainte contre les Piquet pour "dénonciation calmonieuse" et "tentative de chantage aggravé" et nie toute implication dans cette affaire.

Pourtant moins d'une semaine plus tard, l'équipe annonce le départ de Flavio Briatore et Pat Symonds. Peut-être que cette décision a été provoquée par la déclaration de Max Mosley, président de la FIA sur le départ, qui affirme que cette affaire est encore plus grave que celle d'espionnage de McLaren de 2007 qui avait été condamné à une amende de 100 millions de dollars et exclu du championnat constructeur. On parle alors d'une possible exclusion à vie d'une des icones du sport automobile mondial, sans parler des dégâts d'image que cela provoquerait pour le constructeur français en cette période de crise économique particulièrement impactante pour l'automobile.

Reste maintenant à savoir si ces licenciements constituent une première étape avant le retrait du constructeur français ou un signe de bonne volonté pour continuer l'aventure l'année prochaine. Les questions restent posées et actuellement sans réponse. A n'en pas douter, cela devrait changer sous peu. Le Conseil de lundi sera également tout à fait déterminant...

Quant à l'avenir en tant que pilote de Nelsinho, tant on peut douter d'un pilote qui accepte volontairement de se crasher dans un mur à haute vitesse au mépris de santé et de celle de ses concurrents... Surtout que la défense affirmant qu'il l'aurait accepté parce qu'il était dans une grande période d'incertitude morale vis-à-vis de son avenir au sein de l'écurie trahit une faiblesse morale des plus alarmantes... Reste l'option que Papa achète une écurie, comme il l'avait fait en GP2.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article